Grain de sable

Nouveau départ

10 septembre 2019

Franchir le Rubicon », « le passage de la Bérézina » ; certaines expressions en français évoquent par des raccourcis fluviaux les tournants de la vie de Jules César et de l’armée napoléonienne. « Traverser le Jourdain » aurait pu exprimer ce pas que l’on fait pour entrer dans la vie promise par le Seigneur.

Si l’on suit la logique du récit raconté dans l’Exode et dans le livre de Josué, le peuple maintenu en esclavage en Égypte est sorti libre sous la houlette de Moïse. Après 40 ans dans le désert, nomade, le voici prêt à entrer en terre promise et à s’y installer : changement, nouveauté, inconnu… cette traversée du Jourdain symbolise une étape décisive de la vie du peuple.

Vers de nouveaux défis

À l’échelle de nos vies, cette traversée résonne aisément. Ainsi, lorsqu’on ferme pour la dernière fois, la porte d’une maison dans laquelle on a habité de nombreuses années : le camion de déménagement est parti, il faut quitter le lieu. Pas facile ! Il y a souvent comme un sursaut en moi : comment vivre ce geste anodin répété des centaines de fois qui, ce jour-là, a une signification tout autre ? Et l’on voudrait presque le ritualiser. J’entends résonner en moi le réveil matinal de Josué en 3.1 dans cette perspective, car on ne peut que se lever tôt ce matin-là dans un mélange d’excitation et d’appréhension devant l’inconnu de ces jours de transition. J’entends résonner en moi le message de Josué au peuple en 3.5, ce message où Josué demande au peuple de se consacrer à Dieu avant la nuit. Se consacrer, n’est-ce pas ce temps où l’on peut faire le point en vérité devant le Seigneur, prendre le temps de la reconnaissance pour ce qui a été vécu, reçu et donné jusque là ? Peut-être, reconnaître certains moments difficiles ?

Avance avec confiance

Je laisse résonner la traversée ritualisée : le peuple n’a qu’à suivre le coffre de l’Alliance porté par les prêtres. Il ne s’agit pas d’être un aventurier prêt à s’engager courageusement dans un fleuve impétueux, ne redoutant ni les trous d’eaux ni les courants inconnus, mais de marcher en suivant, en empruntant un chemin de confiance, un chemin à pied sec. Pas facile d’avancer vers cet inconnu, mais comme le dit bien la symbolique du cours d’eau à traverser, on ne peut pas rester au milieu, il faut aller de l’avant et comme en témoigne la hâte du peuple en 4.10, on ressent parfois le besoin de se dépêcher. Il y a peut-être même besoin de rapporter quelques pierres du milieu du cours d’eau qui nous rappellent qu’on a traversé à pied sec, qui nourrissent notre confiance.

Pourtant, il importe de garder une certaine distance : environ un kilomètre (deux mille coudées) du coffre de l’Alliance. Cette distance nous parle d’un Dieu qui est à la fois proche et lointain. En même temps il est inaccessible et nous ne pouvons pas mettre la main sur Lui, en même temps nous croyons qu’il peut nous accompagner dans les temps difficiles et se faire proche de nos joies et de nos douleurs.

Autrement dit, comment trouver la « bonne distance » à Dieu pour qu’il soit notre guide ? Dieu qui nous appelle à regarder et à aller plus loin. Il se tient à distance pour que nous puissions avancer et porter attention à ceux qui nous entourent.

Odile Roman-Lombard
Membre du service biblique

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