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Dossier Parole protestante en Basse-Normande

Bénin : Royale entrevue

11 janvier 2017

Arrivée un peu par hasard en cette fin d’après-midi d’exploration de la ville dans le palais du roi de Porto-Novo. Intrigués par la bannière au-dessus du portail, nous sommes entrés avec une collègue française et un collègue béninois dans un vaste parvis au fond duquel se dresse une demeure à étages imposante. Dans un hangar, une calèche, moins dorée que celles de la cour d’Angleterre, mais de style similaire, rangée aux côtés d’une opulente limousine. Quelqu’un s’approche. Désirerions-nous une audience privée ? Coup d’œil de concertation. Pourquoi pas ? Moyennant un geste, un don, c’est tout à fait possible.   

Chaussures enlevées, nous pénétrons dans une vaste salle. Aucun siège si ce n’est le trône. Pour les visiteurs, un tapis rouge sur lequel se poser. Sur le mur, des photographies de toutes tailles mettent en scène le roi en diverses circonstances, en présence de plusieurs personnalités et de plusieurs femmes. 

Après quelques minutes d’attente, Sa Majesté arrive, s’installe face et au-dessus de nous. La conversation s’engage, chaleureuse et directe. Sa royauté, explique-t-il, remonte à la royauté biblique, celle de Saul, de David et de Salomon. Oui, il est profondément chrétien, il connaît les dix commandements. Oui, pour lui, le commandement le plus important est d’aimer son Dieu et son prochain comme soi-même. Mais, précise-t-il, il a déclaré devant Dieu qu’il ne lui était pas possible de pratiquer totalement les commandements en raison de la tradition royale dont il a hérité et à laquelle il lui serait impossible de se dérober (nous comprenons qu’il fait allusion à sa polygamie). Non, les relations ne sont pas toujours simples avec le pouvoir politique (les élections présidentielles viennent de se dérouler. Elles ont porté à la tête du pays Patrice Talon dont l’investiture a eu lieu quelques jours auparavant, le 6 avril). Par contre, son influence coutumière est reconnue , il a été consulté durant la campagne. En cas de troubles sociaux, le pouvoir n’hésite pas à faire appel à lui pour apaiser les tensions. 

Durant l’entretien, un jeune homme traverse la pièce, prosterné jusqu’à terre, détournant le regard du visage du souverain. Une petite fille s’est allongée nonchalamment à nos côtés. Nous lui expliquons les raisons de notre présence au Bénin. Je lui demande l’autorisation de le filmer. Il la refuse en raison de sa tenue : notre arrivée l’a surpris au cours d’un après-midi ordinaire en famille. Mais il va aller se changer, se mettre en tenue royale. Quelques instants plus tard, il est de retour avec son pagne d’apparat et avec à la main son sceptre. L’entretien est fini. Nous nous levons. Je n’aurais jamais cru, bon républicain que je suis, que je bredouillerais un jour « Au revoir et merci Votre Majesté ».

Eric Trocmé

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